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La rupture conventionnelle du contrat de travail

Le succès de la rupture conventionnelle homologuée du contrat de travail, instaurée il y a presque 15 ans,  ne se dément pas, avec 454 000 ruptures conclues en 2021.

 

Vous le savez, la rupture conventionnelle homologuée permet à un employeur et à un salarié de rompre, d’un commun accord, un contrat de travail et de faire valider cette rupture par la direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Dreets). Ses avantages ? Les employeurs « sécurisent » la rupture grâce à l’aval de l’administration et les salariés bénéficient du versement d’une indemnité de rupture tout en ayant droit aux allocations chômage.

À qui s’adresse la rupture conventionnelle ?

La rupture conventionnelle concerne les salariés qui bénéficient d’un contrat de travail à durée indéterminée (CDI). Sachant qu’une telle rupture peut être conclue même durant la suspension du contrat de travail du salarié en raison, par exemple, d’un arrêt de travail consécutif à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, d’un congé de maternité, d’un congé parental d’éducation ou d’un congé sabbatique.

Qui doit la proposer ?

L’employeur et le salarié peuvent indifféremment proposer de négocier une rupture conventionnelle. Une proposition qui ne doit cependant pas être faite de manière trop abrupte, car elle risquerait alors d’être fort mal vécue. Il faut, en effet, toujours garder à l’esprit que non seulement les pourparlers de rupture conventionnelle peuvent ne pas aboutir, mais qu’ils peuvent également très bien ne jamais commencer !

Faut-il discuter longtemps ?

Contrairement à la procédure de licenciement, aucun calendrier de discussion n’est imposé par la loi. La seule obligation étant d’organiser au moins un entretien au cours duquel employeur et salarié conviennent de mettre un terme à leur collaboration. Mais attention, ils doivent tout de même prendre le temps suffisant pour régler toutes les modalités de la rupture (sort de la clause de non-concurrence ou des avantages en nature, notamment).
Plus généralement, ce ou ces entre-tiens préparatoires ont pour objectif de garantir le consentement éclairé du salarié. Il est donc prudent de prévoir un compte rendu écrit, signé par l’employeur et le salarié, récapitulant la teneur de chaque entretien. 

Lors des discussions,  peut-on être assisté ?

Conscients que la présence d’autres personnes est souvent utile au bon déroulement d’une négociation, les pouvoirs publics ont prévu la  possibilité pour le salarié et l’employeur d’être assistés.
Si le salarié décide de se faire aider, il doit en informer, oralement ou par écrit, son employeur. Dans cette hypothèse, ce dernier peut, lui aussi, se faire assister, à condition de prévenir à son tour le salarié. 
Le salarié peut être assisté par un autre salarié de l’entreprise ou, en l’absence de comité social et économique, par une personne inscrite sur une liste de conseillers dressée par le préfet et disponible dans les mairies ou auprès de l’inspection du travail. Côté employeur, il peut s’agir d’un membre du personnel de l’entreprise ou, dans les entreprises de moins de 50  salariés, d’une personne appartenant à son organisation syndicale d’employeurs, ou d’un autre employeur relevant de la même branche d’activité.

Quelles sont les formalités à accomplir ?
Une convention de rupture

Employeur et salarié doivent remplir un formulaire (Cerfa n° 14598*01) destiné à formaliser la rupture. En pratique, celui-ci peut être directement rempli en ligne et imprimé via le téléservice TéléRC. Ce document contient une convention de rupture qui a pour objet de définir, notamment, le montant de l’indemnité versée au salarié et la date de la rupture du contrat de travail. 
Le formulaire doit être établi en deux exemplaires datés et signés par l’employeur et le salarié. L’un d’entre eux est conservé par l’employeur et l’autre est remis au salarié.
Et attention, car en cas de litige, c’est à l’employeur de prouver qu’il a bien remis un exemplaire du formulaire au salarié ! Dès lors, pour se ménager cette preuve, l’employeur doit remettre son exemplaire au salarié contre décharge ou lui faire apposer de manière manuscrite, dans le formulaire, une mention indiquant qu’un exemplaire lui a bien été remis tel jour.

Un délai de rétractation
Une fois le formulaire de rupture conventionnelle signé, l’employeur et le salarié disposent de 15  jours calendaires (donc en comptant tous les jours de la semaine) pour revenir sur leur décision. Pour être valable, cette rétractation doit être communiquée à l’autre partie par lettre recommandée avec accusé de réception ou par lettre remise en mains propres contre décharge. La rétractation n’ayant pas à être motivée.

Une homologation de la Dreets

L’homologation permet aux pouvoirs publics de s’assurer que la procédure de rupture conventionnelle a bien été respectée (règle d’assistance, délai de rétractation…) et de vérifier que le consentement de l’employeur et du salarié à cette rupture est libre. À l’issue du délai de rétractation (et surtout pas avant !), l’employeur ou le salarié doivent demander l’homologation de la rupture auprès de la Dreets. Dans les faits, cette demande consiste à adresser le formulaire de rupture conventionnelle à l’administration. Elle doit être effectuée par voie dématérialisée via le téléservice TéléRC. Un dépôt du formulaire  papier auprès de la Dreets demeure toutefois possible si le salarié ou l’employeur ne sont pas en mesure d’utiliser ce service et s’ils en informent la Dreets.
L’administration dispose ensuite de 15 jours ouvrables (donc en ne comptant ni les dimanches ni les jours fériés), à partir de la réception de la demande, pour répondre. Sachant qu’en l’absence de réponse dans ce délai, l’homologation est acquise. 

Quand la rupture prend-elle effet ? 

Le contrat de travail prend fin à la date mentionnée dans la convention de rupture et, au plus tôt, le lendemain de la réception de la décision d’homologation de la Dreets (ou de l’expiration du délai de 15 jours). Et c’est aussi après validation de la rupture conventionnelle que l’employeur doit remettre au salarié un certificat de travail, un solde de tout compte et une attestation Pôle emploi.

La rupture peut-elle être contestée ?

La validité de la rupture ainsi que son homologation peuvent être contestées devant le conseil de prud’hommes dans les 12 mois suivant la date d’homologation de la convention par la Dreets. Sachant que seuls le vice du consente-ment (dol, contrainte...) et la fraude peuvent remettre en cause cette validité. Toute clause insérée dans la convention visant à renoncer à la possibilité de contester la rupture est réputée non écrite. 
Passé ce délai d’un an, le divorce est définitivement consommé entre l’employeur et le salarié !

Et si la rupture concerne un salarié protégé ?

L’employeur et le salarié protégé (délégué syndical, membre du comité social et économique…) doivent remplir un formulaire de rupture conventionnelle spécifique (Cerfa n° 14599*01) et l’adresser, pour autorisation, à l’inspecteur du travail. Ce document doit impérativement mentionner la nature du ou des mandats détenus par le salarié. Et attention, car le projet de rupture conventionnelle conclu avec un membre du comité social et économique doit obligatoirement être soumis à la consultation de ce comité. L’avis de ce dernier devant être transmis à l’inspection du travail en complément du formulaire. L’inspecteur du travail apprécie alors la liberté du consentement du salarié protégé en diligentant une enquête contradictoire (audition individuelle de l’employeur et du salarié).
La rupture conventionnelle devient effective le lendemain du jour de l’autorisation de l’inspecteur du travail, ce dernier devant statuer dans les 15 jours ouvrables suivant la réception de la demande. Étant précisé que le silence de l’inspecteur du travail vaut décision implicite de rejet au bout de 2 mois.